Avec Jeremy Corbyn, changement historique à la présidence du Labour Party

Jeremy Corbyn a gagné la présidence du Labour Party avec un nombre de votes de préférence dans tout le pays comme on ne l’a jamais vu dans l’histoire de la Grande Bretagne ! Il l’a emporté avec 59,5% des 550.000 électeurs. Il n’y a jamais eu jusqu’alors un si grand nombre de participants à une élection interne. Corbyn a obtenu plus de voix que Tony Blair en 1977. Les positions de Corbyn lors des élections internes du Parti Travailliste contribuent à l’organisation de la lutte contre l’austérité en Grande Bretagne et dans toute l’Europe.
La crise économique, sociale, militaire du capitalisme rend impérieuse la nécessité d’unir toutes les luttes en un Front Unique anticapitaliste et contre la guerre, en Europe et dans le monde entier. L’appui que reçoit Jeremy Corbyn de la part d’un énorme courant de masses en Grande Bretagne n’est pas surgi seulement de la transformation du LP, mais a mûri dans le monde entier qui réclame une planification rationnelle de l’économie au bénéfice de l’humanité. Le capitalisme n’a d’autre but que le profit et l’exploitation, l’intérêt individuel et est incapable d’assumer cette nécessité.
Cela explique l’antagonisme de la bourgeoisie britannique avec Jeremy Corbyn et la base qui le soutient. Le capitalisme ne craint pas tant les positions humanistes de Corbyn, que le fait de s’être converti en centre de regroupement, d’attraction de centaines de milliers de citoyens contre la guerre et les plans d’austérité de la bourgeoisie. La haine que la classe capitaliste exprime envers Corbyn, est due à sa peur de l’intervention de la base prolétarienne du Labour Party, sa peur des luttes du prolétariat qui se concentre dans les Trade Unions Congress, la Centrale syndicale unique, sa peur de la montée de tous les mouvements sociaux qui luttent contre la guerre, contre le TTIP (Traité transatlantique de commerce et Investissements), contre l’austérité et pour la paix, sa peur de tous les mouvements féministes, écologistes, de défense de la nature, sa peur des différents groupes communistes et tendances de gauche et des courants à l’intérieur du Parti Travailliste qui interviennent tous de façon unifiée, dans d’immenses grèves et manifestations.
Des dirigeants comme Corbyn ont soutenu une opposition conséquente face aux guerres déclenchées par l’impérialisme britannique et nord-américain, en s’appuyant sur la répulsion totale des masses à ces guerres. La preuve en est les deux millions de gens qui ont manifesté contre la guerre en Irak. Les travailleurs sont conscients que le fruit de leur travail sert à écraser d’autres pays au lieu de créer du progrès. Les positions de Corbyn expriment ce que ressentent les masses et leur ouvrent la possibilité d’intervenir politiquement.

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L’électorat britannique n’a pas voté pour la stabilité budgétaire
Les Conservateurs soutiennent qu’il n’y a de solution que par la voie capitaliste, que la classe ouvrière manque de vision du futur et n’a pas la capacité de construire la nouvelle société. Cette conception irrationnelle domine au sein de la classe bourgeoise, mais elle est aussi acceptée par un bon nombre des parlementaires du Labour Party. On le voit dans les positions des candidats de la droite travailliste aux élections internes, tels que Kendall, Cooper, Burnham et autres dirigeants du Parti.
Par exemple le député John Cruddas, le principal idéologue de l’aile droite du LP et auteur de son programme électoral, affirme que « l’électorat a voté pour la stabilité budgétaire » et que « les Conservateurs ont gagné car on leur fait confiance pour diriger l’économie, tandis qu’au sein du Parti Travailliste une telle confiance n’existe pas. » Tout d’abord il faut dire que ce ne sont pas les Conservateurs qui ont gagné, mais les Travaillistes qui ont perdu parce que la population n’a rien voulu savoir de « l’équilibre budgétaire » défendu par ces derniers. Les principaux dirigeants travaillistes ont été battus lors des élections de mai 2015, justement parce qu’ils ne s’étaient pas prononcés contre toutes les restrictions sociales favorisant le capitalisme.
Les Conservateurs ont gagné, non parce que le peuple leur fait confiance, mais parce que la classe ouvrière ne peut pas faire confiance au Parti Travailliste ! Quand Tony Blair dit que si Corbyn gagne le Parti Travailliste sera complètement détruit, il parle en fait de l’appareil qui l’a élu et a soutenu toutes les mesures qu’il a prises. Il craint également l’apparition d’un Parti Ouvrier Basé sur les Syndicats. Corbyn veut que le Parti Travailliste en finisse avec la soumission des syndicats au thatchérisme et à Blair. Celui-ci redoute plus sa propre disparition que la destruction du Labour.
La campagne de Corbyn au cours des élections internes du Parti Travailliste a attiré des millions de gens, précisément parce que le peuple n’a aucune confiance dans la conduite de l’économie nationale par les Conservateurs et ces millions veulent que le Parti Travailliste œuvre en faveur des masses et non en faveur du capital.
Il faut créer au sein du Parti Travailliste un solide courant contre les restrictions sociales. Jeremy Corbyn fait campagne pour la réintroduction du Point 4 du programme du Labour Party, éliminé par Tony Blair il y a plusieurs années. Ce Point 4 contient une revendication historique : l’étatisation des moyens de production. Le LP avait jeté aux oubliettes ce principe fondateur.
Une multitude de mouvements ont surgi au cours de ces années, cherchant à pousser le Labour sur sa gauche. Ils soutiennent la candidature de Corbyn, non pour qu’il devienne le représentant officiel du Parti, mais pour l’influencer et l’impulser à représenter la volonté collective d’organiser la lutte contre les régressions sociales en Grande Bretagne.
Le dirigeant du CWU – syndicat des Postes et Téléphones, Dave Ward a déclaré soutenir Corbyn « pour débarrasser le Parti Travailliste du virus de Tony Blair ». Des millions d’électeurs travaillistes avaient abandonné le LP à cause de Blair. Ils retrouvent avec Corbyn, un moyen d’intervenir. Il y a toutes les conditions pour nettoyer le Labour de la pourriture de Blair et compagnie.

Mais ces déclarations de Dave Ward indiquent également qu’il y a de meilleures conditions pour que les bases ouvrières pèsent plus dans leurs propres inorganisations syndicales. Les grèves organisées par un syndicat tel que celui des Employés publics – qui est un des plus importants du pays, les grèves menées en front unique par les syndicats du secteur des transports, sont autant de luttes qui nécessitent une direction politique. Elles passent par-dessus les réticences des couches dirigeantes de l’appareil syndical et elle stimulent l’intervention de secteurs qui, avant, restaient passifs. La fermeté de la classe ouvrière stimule les masses à donner leur appui à Jeremy Corbyn.
Il existe un puissant flux de la révolution dans le monde entier, qui incite à unifier toutes les luttes en cours en Europe vers un front unique contre les restrictions sociales (l’austérité). Corbyn est sensible à cette nécessité. Et même s’il ne gagne pas les élections pour la direction du Parti, ses prises de position sont déjà une grande impulsion d’un processus qui va radicaliser profondément le Labour Party .

14 septembre 2015