Crise de croissance dans le mouvement « Momentum »

La base militante de Momentum apprend à se défendre des attaques de l’appareil du Parti Travailliste.

Qu’est-ce que c’est Momentum ?

Momentum est l’organisation établie en mai 2015 pour appuyer la candidature de Jeremy Corbyn à la direction du Parti Travailliste en remplacement de Ed Miliband.

Momentum comprend des membres du Parti Travailliste, mais aussi beaucoup d’autres personnes qui viennent de la jeunesse, de la gauche et des syndicats. Beaucoup de ces personnes ont réussi à voter pour Corbyn depuis l’extérieur du Parti Travailliste, en payant une certaine somme pour devenir ‘associés’ ou ‘supporters’ de J. Corbyn.

Lors d’une conférence des directions travaillistes et syndicales en 2014, le Parti Travailliste avait introduit cette possibilité pour compenser les grandes pertes en membres subies par le Parti durant les années Blair (1997-2007).

La droite du Parti Travailliste a réagi à l’apparition de Momentum en essayant de marginaliser et de contrôler cette organisation. Le dirigeant général de Momentum, Jon Lansman,  n’a été connu de tous les membres de Momentum qu’après un certain temps.

A la fin décembre 2016  Jon Lansman décide d’envoyer à tous les membres de Momentum – dont il garde jalousement les coordonnées – une circulaire annonçant que Momentum (c’est-à-dire lui-même) a adopté une Constitution qui demande à chaque membre de se joindre au Parti Travailliste pour pouvoir rester membre de Momentum.

Les Comités de base Momentum, qui sont environ 150, ont généralement réagi pour dire qu’ils souhaitaient discuter toute Constitution avant qu’elle ne soit appliquée. La conduite de Jon Lansman est ressentie comme un coup, surtout parmi ceux qui appuient Jeremy Corbyn sans nécessairement vouloir appartenir au Parti Travailliste.

Rappelons ici que pendant l’été 2016, le Conseil de discipline du Parti Travailliste (the Compliance Unit) avait manœuvré pour empêcher des milliers de sympathisants de Corbyn (et même des membres travaillistes) de voter pour lui. Corbyn avait tout de même été élu à la direction du Parti Travailliste avec 61,8% des voix (après deux scrutins où il avait chaque fois accru son vote)  – au grand désespoir et furie de l’appareil du Parti où les grands dirigeants favoris de Tony Blair s’avèrent presque impossibles à déloger. Ces derniers s’unissent avec la classe capitaliste pour jouer les plus mauvais tours à Jeremy Corbyn.

Avec sa Constitution, Jon Lansman veut que cette grande masse d’enthousiastes pour Corbyn passe sous la discipline du Parti Travailliste, c’est-à-dire sous le contrôle d’une machine qui déteste Corbyn et encore plus le socialisme.

La Constitution de Jon Lansman représente une attaque contre J. Corbyn

Obliger Momentum à s’intégrer au Parti Travailliste, c’est faire passer cette organisation sous le contrôle du Conseil de discipline du Parti ; c’est aussi faire perdre à Momentum sa liberté d’appuyer Corbyn et des solutions socialistes sans subir les représailles de la droite conservatrice du Parti. L’intention est de décourager la gauche, de l’affaiblir et de l’inciter à abandonner. L’idée est de diminuer l’appui à Corbyn. En connivence avec les appareils parlementaires et étatiques du capitalisme, la droite travailliste veut empêcher Corbyn d’avancer plus à gauche et de se lancer à la conquête du gouvernement en 2020.

La classe capitaliste se tait sur la question de cette Constitution. Elle voudrait bien que la base militante travailliste s’intimide et retourne à la passivité. C’est pourquoi les medias de la classe bourgeoise sont constamment à l’affût de personnes de ‘gauche’ dans l’orbite travailliste pour les livrer au Conseil de discipline du Parti. Ainsi se révèle clairement la complicité entre l’appareil anti-socialiste du Parti et l’appareil capitaliste de la classe bourgeoise.

Tous comptes faits cependant, la Constitution de Jon Lansman n’est pas vraiment dans l’intérêt du Parti Travailliste. Car si le Parti veut survivre, il va devoir lutter de toutes ses forces : celles du Parti bien sûr, mais aussi celles des syndicats, de la jeunesse et de toute la gauche. Momentum a donc un rôle important à jouer, et pas seulement dans le Parti. Il faut une discussion dans l’ensemble de l’organisation, ce qui n’a pas encore eu lieu, pour essayer de concilier le fonctionnement à l’intérieur et à l’extérieur du Parti.

Une crise de croissance

Les Posadistes pensent que la crise actuelle dans Momentum est une crise de croissance. Ce n’est pas une crise de désintégration comme certains camarades le disent. Celui qui se désintègre c’est bien le capitalisme. Quoi que fasse la droite travailliste, le Parti Travailliste ne peut pas se débarrasser de sa gauche, car il en a besoin pour faire face aux centres capitalistes, comme UKIP,  qui veulent l’éliminer. Il n’est pas exclu non plus que la classe capitaliste en vienne bientôt à soutenir Jeremy Corbyn contre un mouvement encore plus à gauche que lui.

De la même façon, le Parti Travailliste va devoir compter sur ses centaines de milliers de supporters. S’il ne le fait pas, il ne pourra pas s’opposer au Parti Tory, ou à UKIP qui lui fait la guerre, et leurs alliés dans la droite Unioniste d’Irlande du Nord, et autres.

La crise de croissance de Momentum fait partie de la lutte de classe qui s’exprime dans le Parti Travailliste. Momentum a besoin de journaux, de bulletins, de réunions et de comparaisons d’idées. Les idées les plus scientifiques, comme les idées marxistes, doivent y être entendues, pour donner un appui efficace à Jeremy Corbyn, pour prévoir la suite des événements et pour créer des équipes socialistes solides pour l’étape qui vient.

Posadiststoday.com – 21.1.2017