Nous publions ci-dessous des extraits d’informations que nous a communiquées notre correspondant en Colombie : la première du mois d’avril 2018 sur l’accord réalisé avec les FARC, la deuxième du mois d’août 2018 sur le résultat des élections présidentielles et leurs conséquences.
L’accord signé avec les FARC en Colombie
L’accord signé avec les FARC ouvre en Colombie un mouvement d’opinion publique qui peut mener la dispute dans les élections présidentielles. La droite a peur du développement à la Castro ou à la Chavez et mène une enquête sur Gustavo Petro, ex leader guérillero du M19 qui fut maire de Bogota. « Je dois gagner sinon ils me tuent », a-t-il dit lors d’une interview.
Il faut approfondir les possibilités de changement après plus de cent ans d’échecs libéraux – conservateurs, qui a mené la population à une abstention d’un peu plus de 50%. La campagne de Gustavo Petro doit servir à sortir de cet échec permanent et gagner au minimum 10% des voix abstentionnistes. Le programme qu’il pose n’est pas socialiste mais il s’attaque à la question des terres improductives des grands propriétaires terriens en instituant un impôt qui servira pour des mesures sociales.
Il existe en Colombie 7 bases militaires des Etats-Unis, qui ont fait partie d’un accord du gouvernement de Pastrana (ex président) pour soi-disant contrôler le commerce de la coca. Mais ce commerce n’a jamais été aussi florissant : 25.000 hectares produisent 70 tonnes de coca et 25 millions de dollars, mais cela correspond à 300.000 dollars du point de vue du commerce des Etats-Unis. Il existe aujourd’hui 250.000 hectares semés. En tant que marchandise la coca favorise les banques et la haute finance et génère de grandes quantités de dollars du marché externe vers le marché interne.
Les guérillas ont défendu la culture des paysans et touchaient des impôts pour faire sortir la coca. L’impérialisme cherche avec ce commerce à faire pression sur le gouvernement colombien pour qu’elle extrade les dirigeants qui ont signé l’accord de paix.
L’application de la dictature de la bourgeoisie exercée au Brésil contre Lula et le processus de changement en cours montrent la fin de la démocratie bourgeoise. Evo Morales de Bolivie l’a défini comme un nouveau Plan Condor qui s’applique à travers l’appareil judiciaire. L’affaiblissement des droits démocratiques au niveau du système bourgeois capitaliste doit trouver une réponse dans l’approfondissement du programme vers le socialisme, en corrigeant les erreurs en chemin.
C’est ainsi qu’au Venezuela le processus révolutionnaire bolivarien se consolide en appliquant la dictature du prolétariat exercée par le peuple, en accord avec les militaires chavistes anti-impérialistes. Venezuela et Cuba doivent intégrer l’ensemble des peuples d’Amérique Latine dans un plan économique qui élimine la faim et tout ce qui affecte la population.
De notre correspondant en Colombie – avril 2018
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Les élections présidentielles en Colombie
Les 8 millions de voix obtenues par le candidat de la gauche, Gustavo Petro, ont une signification historique. C’est la victoire des mouvements sociaux qui disputent le pouvoir à l’oligarchie colombienne. La Colombie avance dans l’incorporation du processus des luttes sociales en Amérique Latine, où l’expérience gagnée par une large partie des pays, qui ont établi des gouvernements progressistes en s’appuyant sur les luttes populaires, s’est transformée en mouvements anti-impérialistes et anticapitalistes.
Toute l’oligarchie, par l’intermédiaire de son candidat Ivan Duque, n’a reçu que 10 millions de voix, qu’il a achetées en grande partie. Ces votes représentent la défense d’un Etat qu’elle s’est appropriée depuis des décennies. Les membres de cette oligarchie se distribuent entre eux les postes publics, les contrats et les revenus légaux et illégaux aux dépens de la pauvreté de la majorité de la population. Les voix qu’ils ont obtenues ne font que 25% du total, mais c’est avec cette minorité que la bourgeoisie a maintenu une dictature sur la distribution des richesses produites par l’ensemble de la population.
Pour que ce résultat soit un triomphe de l’unité des partis et des mouvements du centre à la gauche, appuyés par la sympathie de l’ensemble de la population, il faut à présent renforcer les processus de lutte pour les changements et les transformations sociales, vers plus d’égalité et d’unité avec l’ensemble des peuples en lutte d’Amérique Latine, afin de construire une Amérique libre et indépendante. Il faut rompre la dépendance économique et militaire avec l’impérialisme.
Il faut continuer la lutte pour construire une force politique, économique et sociale, tendant vers la planification de l’économie en fonction des nécessités de la population. La réforme agraire et la réforme urbaine, qui se sont effondrées devant la migration des campagnes vers les villes, est une tache centrale pour l’équilibre des forces productives. Il faut mener une réforme intégrale, avec un appui technique pour que les terres deviennent productives et autosuffisantes, incorporer les coopératives dans un système de transport efficace pour qu’elles fassent parvenir leurs produits à la population. Il faut revenir à la culture familiale d’un hectare ou d’une surface productive suffisante et faire en sorte que par la vente des produits une famille puisse avoir un salaire digne. Il faut combiner la culture familiale avec les coopératives de commerce des produits et encourager le troc comme façon d’accroitre la confiance dans le rendement de la terre.
Le rôle de l’Université et de l’école est fondamental si elles s’engagent de façon supérieure dans un appui technologique, un apport de connaissances et une aide technique, selon les besoins de l’agriculture. Il s’agit de participer au fonctionnement et à la gestion des réservoirs d’eau pour produire une eau de qualité, au contrôle des terres et des semences, au contrôle des produits et de leur diversité en vue d’un meilleur rendement productif, à la maîtrise de la nature, des insectes et des oiseaux, qui doivent faire l’objet d’études particulières à chaque fois. La science doit être au service d’une relation harmonieuse avec la nature afin de développer les meilleures conditions dans la culture et l’élevage.
Il faut ressortir le projet de chemin de fer qui durant cent ans est resté dans l’oubli, créer des gares tous les 20 kms, et l’utiliser pour transporter les produits agricoles et de l’industrie de transformation nécessaire au traitement des produits agricoles. L’oligarchie du pays n’a pas seulement vendu le canal de Panama et tout le Panama pour 25 millions de dollars (note : le Panama avant son indépendance en 1903 faisait partie de la Colombie), mais elle a accepté avec cette vente d’enterrer le chemin de fer, y inclus le tunnel de La Linea, comme condition pour ne pas faire concurrence au canal. Cette décision de l’oligarchie et des partis libéraux et conservateurs a accru considérablement la lutte pour la propriété des terres et a développé une guerre à mort.
Le front national de la droite aujourd’hui recommence une vieille histoire, celle des assassinats, des massacres et de l’exploitation du peuple et de ses dirigeants qui luttent pour qu’on leur rende les terres volées et saccagées par l’armée et les paramilitaires. Cette lutte pour la défense de la terre et sa restitution doit être celle des 8 millions de colombiennes et de colombiens des villes et des campagnes. Il ne s’agit pas seulement d’une lutte pour la survie mais pour le progrès humain.
A partir de la « Marche pour la Vie digne, la paix et la justice sociale », qui a été appelée pour le 7 août dans tout le pays, jour de la prise de fonction du nouveau président élu Ivan Duque, nous devons consolider cet encourageant résultat électoral pour former une majorité organisée qui donne les forces nécessaires pour changer, transformer et éliminer toutes les coutumes oligarchiques et bourgeoises, pour construire une vie meilleure, plus humaine, plus égalitaire, pour donner à ce peuple dont la lutte est incessante de meilleures conditions de vie et de progrès.
Extrait de Voz Posadista de Colombie – Août 2018