Face à la pandémie le gouvernement progressiste approfondit les mesures de soutien à la population

La pandémie a mis à nu toute la crise du capitalisme. Les politiques d’ajustement avec la privatisation des services publics ont entraîné une attaque contre les masses, un affaiblissement et une perte de souveraineté de l’État. L’Union européenne a dévasté le sud de l’Europe par sa politique d’ austérité, aujourd’hui on souffre des conséquences.

Ce gouvernement a hérité de services de santé grandement détériorés et manquant des ressources minimales pour y faire face. Les coupes dans la santé ont eu lieu au cours des 20 dernières années, y inclus sous les gouvernements socialistes, et se sont approfondies beaucoup plus avec les gouvernements PP et en Catalogne sous la direction de la droite nationaliste catalane. La pénurie de personnel, le manque de matériel nécessaire et sûr pour lutter contre le virus, ont provoqué un effondrement de la santé publique qui a contribué à la mort et à la grande contagion du personnel de santé, y compris la mort de beaucoup d’entre eux.

Les privatisations, qui ont eu lieu dans toute l’Europe ont provoqué une ponction sur la santé publique et un transfert de services vers de grands consortiums de santé, détenus par des fonds spéculatifs et des multinationales. La même situation s’est produite dans les maisons de retraite, pour la plupart privées, sans contrôle de l’État et à un coût très élevé pour les familles. Le critère de rentabilité a prévalu. Le nombre élevé de décès est un autre exemple de la criminalité de ce système. Dans beaucoup de cas, les familles n’ont même pas pu faire leurs adieux.

La réponse du peuple, du mouvement ouvrier en particulier, a été très rapide et décisive. Les travailleurs de SEAT ont arrêté la production et forcé l’entreprise à fermer mais à maintenir une ligne de travail pour produire des respirateurs pour les hôpitaux. De petits ateliers textiles ont fait des masques et des éléments de protection. Une coopérative d’immigrants s’est jointe à cette activité. À cela s’ajoute la réaction tardive du gouvernement pour prendre les mesures de sécurité nécessaires :  fermeture des frontières, tests généralisés, confinement généralisé qui aurait dû être immédiat  au vu de la grave situation que l’Italie connaissait déjà. Les pressions exercées par les groupes de pouvoir économique, par les grandes entreprises, sont à l’origine de l’attitude faible du gouvernement.

Espagne en confinement

Le matériel sanitaire a été acheté à la hâte, notamment auprès d’entreprises chinoises, sans contrôle, ce qui a conduit à l’achat de produits de mauvaise qualité ne répondant pas aux conditions nécessaires. Le gouvernement Sánchez, suite à une forte pression de Podemos a fini par approuver le « Bouclier Social contre le Coronavirus » et adopté les mesures sociales suivantes :

  • Toutes les expulsions sans logement alternatif sont suspendues, les contrats de location sont prolongés de 6 mois
  • Prolongation du moratoire sur les hypothèques
  • Les coupures de courant dans les résidences des particuliers sont interdites pendant la durée de l’état d’urgence
  • Subvention pour les travailleurs domestiques qui perdent leur emploi ou dont les heures de travail sont réduites
  • Indemnités de chômage extraordinaires pour les travailleurs temporaires
  • Une alternative de logement sûr est garantie pour les victimes de violences conjugales.

Plus de 40 000 entreprises ont eu recours au chômage temporaire qui permet de suspendre les contrats de travail ou de réduire temporairement les heures de travail. 70% du salaire est ainsi payé par l’État. Les licenciements pour cause de maladie, imposés par la réforme du travail faite par le Parti Populaire, ont été abolis, mais la réforme en tant que telle n’a pas été supprimée par le gouvernement, bien que cette revendication ait fait partie du programme électoral de la coalition PSOE-Podemos.

Enfin, un revenu minimum vital a été approuvé, c’est une avancée sociale très importante annoncée par Pablo Iglesias, en tant que vice-président des Affaires sociales. Cette mesure  essaie de réduire les inégalités aiguës visant les groupes les plus vulnérables, y compris les immigrants en situation régulière (ceux qui ne sont pas régularisés en sont exclus). 2,3 millions de personnes en bénéficieront, notamment dans les ménages avec enfants. Il faut savoir que l’Espagne est le troisième pays d’Europe en matière de pauvreté des enfants.

Le gouvernement a réagi avec une certaine sensibilité à la crise sociale aiguë. Mais c’est insuffisant. Les pressions de l’Union européenne et de l’OTAN – rejetant le recours à des Médecins cubains pour intervenir en Espagne – en sont un exemple.

La droite mène une opposition très dure qui essaie d’épuiser le gouvernement et si possible de le conduire à de nouvelles élections. Quoi qu’il en soit, à Madrid gouvernée par le PP, la situation était la plus grave et la plus méprisante pour la vie et les conditions de la population. Les personnes âgées dans les résidences se sont vu refuser des soins hospitaliers pour donner la priorité aux plus jeunes car les unités de soins intensifs (ICU) n’avaient pas de lits disponibles. Les enfants des écoles publiques ont été privés des repas scolaires, ceux-ci étant remplacés par des pizzas et de la restauration rapide de la pire qualité.

De grandes entreprises comme Nissan ont déjà annoncé la fermeture des trois usines espagnoles d’ici la fin de l’année. La réponse des travailleurs a été immédiate : assemblées de mobilisation, grève illimitée et grande solidarité de toute la gauche. Alcoa, une usine d’aluminium à Lugo (Galice), se sépare de la moitié des effectifs et menace l’entreprise de fermeture totale, alors que 20 000 emplois directs et indirects en dépendent.

Les syndicats majoritaires soutiennent ces luttes mais ne proposent pas d’alternatives. La gauche plus radicale propose la nationalisation. Podemos le fait également, mais timidement. Le gouvernement y réfléchit. La gauche syndicale et les mouvements sociaux proposent un plan social beaucoup plus profond tel que la réquisition de toutes les ressources de santé, un moratoire sur le paiement des loyers et des hypothèques, une couverture de 100% du salaire et une couverture économique des soins.

Des manifestations sont déjà annoncées pour les différentes revendications avec le slogan « Que la crise soit payée par les banques et l’IBEX 35 » (les grandes entreprises), pour la répartition du travail et de la richesse, l’abrogation des réformes du travail, le retour à la gestion publique de tous les services publics qui ont été privatisés, garantie d’un logement décent, régularisation immédiate de tous les migrants. Ce sont de très bonnes propositions mais elles sont mises en avant  sous forme d’affrontement contre le gouvernement de coalition de gauche.

En même temps, la situation de Podemos n’est pas favorable : il y a beaucoup de luttes internes et une consolidation d’un appareil qui empêche le débat ouvert. Le front unique et la discussion d’un programme global de transformations sociales sont les tâches fondamentales de l’étape suivante.

Traduction du blog Posadistas Hoy – 15 juin 2020