Le rôle politique des syndicats est légitime et nécessaire en Belgique

Le patronat belge se plaint du rôle politique joué par les syndicats et du caractère politique des grèves qui se sont multipliées ces derniers mois. Quand les travailleurs se mobilisent pour défendre la Sécurité sociale, la réduction du temps de travail, les acquis sociaux des systèmes de pension, un niveau de vie et des conditions de travail décentes, le droit à des services publics de qualité pour tous, le droit à emploi, le droit à une justice équitable et un enseignement démocratique, alors, gouvernement, partis de droite, patronat et medias s’y mettent tous pour les accuser des pires maux : ils « font des grèves politiques » !

Mais quand ce gouvernement de droite applique la politique d’austérité dictée par les instances européennes, sape la sécurité sociale, les systèmes de pensions, privatise les services publics, réduit l’impôt des sociétés, le capitalisme se frotte les mains et se félicite, les grands patrons n’ont pas eu besoin de faire une « grève politique » pour soutenir leurs exigences : le gouvernement Michel est à leur service.

Aujourd’hui, les capitalistes ne concèdent plus rien aux travailleurs, même pas des miettes. La concurrence entre eux est féroce et leur avidité pour le profit ne laisse aucune place aux « valeurs » et à la « morale ». Leur comportement vis-à-vis des millions de réfugiés qui affluent aux frontières de l’Europe est immonde et représente le plus crument ce qu’ils sont disposés à faire contre les masses populaires de chacun des pays européens, Brexit ou pas Brexit.

Dans ces conditions, la moindre revendication du mouvement syndical est politique, les grèves deviennent forcément politiques, et c’est la conclusion à laquelle sont arrivés logiquement les travailleurs quand ils manifestaient en criant qu’ « il faut faire tomber le gouvernement Michel ».

Les medias ont eu beau jeu de décréter que « les mouvements de grève s’essouflaient » car ils n’avaient pas réussi à faire tomber ce gouvernement. Ce n’est qu’un répit ! La rentrée promet d’être chaude, en Belgique comme en France d’ailleurs, comme en Grande Bretagne ou en Italie, comme dans chacun des pays de l’Union Européenne. Il faut qu’on fasse les comparaisons entre les principales revendications des travailleurs – avec ou sans emploi – de tous ces pays : elles sont partout les mêmes. Ce qu’on ne parvient pas à obtenir pays par pays, on peut y arriver en unifiant beaucoup plus profondément les luttes au niveau de toute l’UE. On peut contrer le dumping social.

Un programme commun de base pourrait être :

  • l’instauration d’un salaire minimum dans tous les pays de l’UE prenant comme référence le niveau le plus élevé,
  • les 35 heures/semaine sans perte de salaires et avec embauche compensatoire dans toute l’UE,
  • généraliser le CDI, le contrat à durée indéterminée,
  • défendre les services publics et instaurer des services publics européens,
  • construire et exercer le contre-pouvoir syndical à l’échelle de l’UE,
  • unification syndicale à l’échelle nationale et de l’UE,
  • faire fonctionner une véritable démocratie syndicale à partir des entreprises, des branches, des régions.

images Belgique Travaillons moins

L’unité des travailleurs wallons et flamands est indispensable

Dans son discours du 11 juillet, le ministre-président N-VA de la Communauté flamande, Geert Bourgeois, a déclaré : « la frontière linguistique est devenue une frontière grévicole et les Flamands crachent dessus. Le fossé entre Nord et Sud ne s’est pas comblé, au contraire ». Ces invectives visent à diviser la population de Belgique entre nord et sud, à semer la zizanie entre les travailleurs qui ont fait grève plus ou moins longtemps. S’y ajoutent le mépris et l’arrogance envers les grévistes qui mériteraient seulement qu’on leur crache dessus.

Avec la fédéralisation de la Belgique, les services publics ont été affaiblis, chacun se battant dans « sa » région, comme on l’a vu dans les sociétés de transport en commun (De Lijn, la Stib, les Tec). Plus récemment, à cette fédéralisation s’est ajoutée la politique ultralibérale de l’Union Européenne, la directive Bolkestein de la Commission Européenne et d’autres qui ont suivi pour continuer à démanteler les services publics, à les mettre à genoux financièrement et ainsi les livrer à bas prix aux grandes sociétés privées multinationales, c’est ce qui se passe avec les chemins de fer et la Poste, le service des eaux, les universités.

Ces processus se sont accélérés terriblement et la forte droite flamande nationaliste qui domine le gouvernement Michel revendique déjà une 7e Réforme de l’Etat. Le ministre-président se permet d’insulter toute une partie de la population et de cracher sur les grévistes ! Il fait tout pour diviser les travailleurs flamands et wallons. Les mensonges ne manquent pas : si les mouvements de grève dans  certains services publics (par exemple les gardiens de prison, les transports en commun) ont été plus importants « au sud de la frontière linguistique », c’est en bonne partie à cause de la régionalisation de ces services qui avait provoqué des différences de conditions de salaires et de travail entre Flandre et Wallonie.

Mais de très nombreux travailleurs flamands et bruxellois de ces secteurs ont aussi participé aux dernières grèves ! Et toutes les manifestations syndicales de 2015 et 2016 ont rassemblé flamands, bruxellois et wallons, ainsi que de très nombreux sans emploi, des jeunes, des réfugiés, des sans papiers. Il faut maintenir et renforcer au maximum cette union pour la rentrée sociale et les prochaines mobilisations et y intégrer les mouvements contre la guerre et les dépenses militaires, le combat pour la dignité humaine et les droits démocratiques, toutes les associations qui luttent pour un grand changement de société.

Les Posadistes en Belgique – 13 juillet 2016