L’OTAN, alliance militaire d’agression dès sa création

Cet article est paru comme éditorial du journal « Alerte OTAN » édité par le Comité de Surveillance OTAN, dans son édition spéciale du contre-sommet de l’OTAN des 21 et 22 juin 2025. Il est suivi par la déclaration de la plateforme « Stop militarisation » qui regroupe une cinquante d’associations pour la paix et de mouvements sociaux qui s’opposent au programme militariste imposé par le gouvernement Arizona en Belgique.

Le 26 juin 1945, la toute jeune Organisation des Nations Unies, fondée sur le principe de l’égalité souveraine de tous ses Membres,  adoptait solennellement sa Charte, dont le tout premier article proclamait que  « les parties s’engagent (…) à s’abstenir dans leurs relations internationales de recourir à la menace ou à l’emploi de la force de toute manière incompatible avec les buts des Nations Unies« .

La Charte des Nations Unies explicitait l’obligation qu’ont les pays membres « d’unir les forces pour maintenir la paix et de prendre des mesures collectives efficaces en vue de prévenir et d’écarter les menaces à la paix« .

Quatre ans plus tard, douze pays, dont neuf des pays fondateurs de l’ONU1, parmi lesquels les grandes puissances impérialistes de l’époque, formaient une coalition militaire contre, explicitement, un autre pays cofondateur de l’ONU, l’URSS, dont ils déclaraient théâtralement « avoir peur ».

Unir les forces [des membres des Nations Unies] pour maintenir la paix ? S’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force ? En 1950, le chef du Département d’Etat US déclarait « on ne peut traiter avec l’URSS qu’en créant des situations de force. Tel est le but du programme de fourniture d’armements (à l’Europe occidentale) ».

La création de l’OTAN était fondamentalement contradictoire  avec l’esprit de la Charte des Nations Unies, quelles que soient les arguties introduites dans les statuts de l’Alliance. Pas seulement en mars 1999 avec l’agression de la Yougoslavie, pas uniquement en 2003 avec sa longue occupation de l’Afghanistan, mais dès sa création en 1949.

De la guerre de Corée à la guerre d’Ukraine

Dès juin 1950, l’OTAN participait à la guerre de Corée. Sous commandement américain, 5 Etats membres de l’OTAN, dont la Belgique, se joignent à la force militaire internationale débarquée en Corée. Le conflit coréen était le premier véritable test de l’OTAN, même s’il se déroulait à l’autre bout du monde, comme l’exprimait ouvertement Truman et d’autres dirigeants otaniens.

Par delà la destruction de l’URSS, l’objectif central de l’OTAN était et reste toujours d’assurer le maintien de l’hégémonie « occidentale » sur le monde.

En 1991, l’Union Soviétique s’est auto-dissoute, entraînant celle du Pacte de Varsovie2. Mais l’OTAN ne s’est pas dissoute, malgré la disparition de sa raison d’être officielle. Bien au contraire, c’est à partir de 1991, débarrassée de tout contrepoids, qu’elle a pu montrer sa pleine nature de bras armé de l’impérialisme. De guerre en guerre, acteur principal (Yougoslavie, Afghanistan, Libye), ou secondaire (Irak, Syrie), l’OTAN s’est inexorablement dirigée vers l’étape suivante, l’assujettissement final de la Russie.

Depuis les années 1990 l’Alliance a absorbé 16 nouveaux membres, se rapprochant peu à peu de sa cible. En 2014, les États-Unis et l’UE ont franchi une ligne rouge fatale, en soutenant sans vergogne un coup d’état à Kiev mené sous la houlette d’organisations paramilitaires fascistes, et en apportant l’aide de l’OTAN à la guerre du régime ukrainien contre la partie de sa population qui s’en était révoltée. L’intervention militaire russe directe est survenue après 8 ans d’une guerre atroce et occultée ici.

La guerre actuelle est l’aboutissement d’une longue guerre de l’OTAN contre la Russie, qui est en cours depuis bien avant 2014.

Trois ans après le déclenchement de cette guerre ouverte avec la Russie, l’effondrement espéré de l’ennemi ne s’est pas produit, malgré l’accumulation des sanctions économiques et les franchissements successifs des « lignes rouges ».

Il est indispensable d’identifier clairement la responsabilité de l’OTAN dans cette guerre. Ne pas le faire nous enferme dans le narratif médiatique de « l’agression non provoquée », dont la seule réponse est, bien sûr, « la défaite militaire de l’agresseur« , toute négociation étant dénoncée comme capitulation.

Construire un front mondial contre la guerre que prépare l’OTAN

Au Sommet de La Haye, l’OTAN veut nous précipiter dans la 3e guerre mondiale,  et imposer ses « règles » au monde entier. Le génocide de la population de Gaza par l’Etat fasciste d’Israël n’est possible que par la complaisance, la complicité, l’incitation, la collaboration des principaux dirigeants de l’OTAN.

Le Contre-sommet OTAN qui se tiendra simultanément aux Pays-Bas et dans tous les pays membres de l’Alliance Atlantique peut développer des actions de contre-pouvoir très importantes. Un grand front contre l’OTAN et ses guerres est en construction. Partout, montent les mêmes exigences : STOP Militarisation – Non à l’économie de guerre – Pas question d’enrichir le complexe militaro-industriel –  Verser les 100% des PIB pour le progrès social et culturel des populations – Démocratie participative et protagoniste pour organiser la coopération entre les peuples du monde entier.

le 21 juin 2025

Notes :

1. Belgique, Canada, Danemark, Etats-Unis, France, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni, membres fondateurs de l’ONU, ainsi que Islande, Italie, et Portugal.

2. Réunissant l’URSS, la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Hongrie et la Bulgarie

Photo de une : Mobilisation des organisations belges lors du contre-sommet de l’OTAN

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Déclaration de la plateforme « Stop militarisation »

Les armes rendent le monde plus dangereux
Stop à l’augmentation des dépenses militaires et à la militarisation de nos sociétés

Le génocide à Gaza, la guerre en Ukraine, au Congo, au Soudan et tous les nombreux autres conflits armés mettent le système international sous très forte pression. La guerre est une horreur et la recherche de solutions est essentielle. Le gouvernement belge n’envisage qu’une seule option : plus d’armes et plus de dépenses militaires. Mais l’histoire montre que cela ne mène pas à la paix, ni ne permet de garantir la « sécurité ».

Les problèmes de sécurité internationale sont enracinés dans les bouleversements socio-économiques et environnementaux, le pillage et l’exploitation ou sont les conséquences d’un manque de diplomatie et de mécanismes multilatéraux de sécurité collective.

Réduire la sécurité à une question d’armement et de confrontation militaire présente d’énormes dangers. La militarisation toujours plus soutenue de la scène internationale empêche la coopération multilatérale, pourtant indispensable si l’on veut s’attaquer aux problématiques mondiales urgentes, dont la pauvreté, la faim, le logement, le dérèglement climatique, le génocide, les conflits armés ou la menace nucléaire. L’augmentation continue des dépenses militaires s’organise au détriment des ressources nécessaires aux mécanismes qui assurent réellement la sécurité des individus et de la planète. 

Une architecture de sécurité inclusive, qui accorde une place centrale à la diplomatie, au désarmement, à la justice sociale et à la durabilité environnementale doit être au cœur de notre approche visant à assurer la paix et la sécurité. Nous appelons le gouvernement à réviser en profondeur l’accord de coalition dans ce sens.

  1. Pour une société en sécurité, pas d’augmentation des dépenses militaires

Le budget militaire belge a doublé entre 2017 et 2024, passant de 3,9 milliards d’euros à 7,9 milliards d’euros. Il a bénéficié de deux cycles de « recapitalisation » avec des injections financières de 9,2 milliards (gouvernement Michel, 2019) et 10,2 milliards (gouvernement De Croo, 2022). Pourtant, et malgré la période d’austérité budgétaire annoncée pour cette législature, le gouvernement Arizona souhaite encore augmenter les dépenses militaires de la Belgique à 2% du PIB d’ici 2029 et 2,5% d’ici 2034. Entre-temps, le gouvernement semble même vouloir accélérer ses ambitions pour atteindre l’objectif de 2% déjà en 2025. Cela correspond à une augmentation de 4,5 milliards d’euros du budget annuel de l’armée belge. L’équivalent de ce qu’on annonce comme économie sur les dépenses sociales et les services publics durant cette législature. 

Toutefois, selon le secrétaire général de l’OTAN, cela reste insuffisant. Il appelle à ce que les dépenses en matière d’éducation, de santé et de pensions soient encore réduites au profit des budgets militaires. Dans la perspective de son sommet en juin 2025, l’OTAN envisage ainsi d’augmenter la « norme budgétaire » à au moins 3%. Officiellement, cette nouvelle « nécessité » se fait sentir à cause de la « menace russe ». Or, aujourd’hui déjà, les dépenses militaires de la Russie représentent à peine 10% de celles des États membres de l’OTAN, et à peine ⅓ de ce que les pays européens dépensent pour leurs armées, alors que la Russie est empêtrée dans le bourbier de la guerre en Ukraine. La possibilité que la Russie s’engage dans une confrontation militaire avec un État membre de l’OTAN est très largement contestable et ne permet pas de légitimer cette militarisation continue. 

Nous demandons instamment de réallouer les investissements envisagés vers la sécurité sociale, les services publics, la solidarité internationale, la lutte contre le dérèglement du climat ou l’accueil des réfugiés. Vers tous les mécanismes qui participent effectivement et réellement à la sécurité humaine.

2. Pas de vente d’actifs publics au profit de l’industrie militaire

Le gouvernement prévoit de puiser une part significative des ressources destinées à l’augmentation du budget de l’armée dans un nouveau « fonds pour la défense » à créer. Celui-ci serait alimenté par la vente d’actifs publics. En pratique, cela signifie que les fonds issus de biens publics seraient injectés dans l’industrie de l’armement et dans l’achat de matériel de guerre, y compris des avions de chasse supplémentaires et une troisième frégate.

Nous nous opposons à la privatisation des ressources collectives au profit du complexe militaro-industriel et rappelons qu’il est illusoire de croire que plus d’armes garantira plus de sécurité.

3. Diplomatie, désescalade et garanties mutuelles de sécurité

Nous rejetons un ordre mondial fondé sur les rivalités entre blocs de puissance visant la domination géostratégique. 

La fin de la guerre en Ukraine peut ouvrir la voie à une nouvelle prise de conscience de la nécessité d’investir dans un système de sécurité inclusif, basé sur le principe que la sécurité ne peut être recherchée au détriment des autres. La Belgique peut jouer un rôle proactif dans l’établissement d’un accord de paix avec la Russie basé sur le respect du droit international, les intérêts de sécurité mutuels et le désarmement. La diplomatie et la désescalade constituent les matrices d’une paix durable. 

Il est impératif de poursuivre une politique volontariste qui vise à préserver et à renforcer le système multilatéral, le droit international et les droits humains.

4. Les armes nucléaires hors de Belgique

La guerre en Ukraine a à nouveau rendu perceptible le danger d’une confrontation nucléaire. Il est inacceptable que le gouvernement refuse de confirmer officiellement la présence d’armes nucléaires étatsuniennes sur le territoire belge et refuse de communiquer sur le déploiement récent de nouvelles bombes nucléaires B61-12 dans notre pays. Ces armes nucléaires font de notre pays une cible et augmentent l’insécurité. Pour les déployer, notre pays a en outre commandé 34 avions de combat F-35 à un coût exorbitant. Le gouvernement doit mettre fin au secret et permettre un débat transparent. Nous voulons que ces armes de destruction massive quittent notre territoire. Le gouvernement peut prendre l’initiative pour une Europe et un monde dénucléarisés. La Belgique devrait adhérer au Traité d’interdiction des armes nucléaires.

5. Une culture militariste n’est pas une culture de la sécurité

Pour convaincre la population d’accepter l’augmentation des dépenses militaires et la militarisation, le gouvernement entend développer « une approche pansociétale », pour sensibiliser « l’ensemble de la société à une nouvelle culture de la sécurité ».  En d’autres termes, il tente d’effrayer la communauté. Or, la culture militarisée de la sécurité ne permet pas à une société de comprendre ou de relever les défis majeurs auxquels l’humanité est confrontée. Nous appelons à la promotion active des droits humains, de la démocratie et de la justice – en bref, à la promotion d’une culture de la paix, dans laquelle l’éducation occupe un rôle central.