Que se cache-t-il derrière les calomnies de la droite du Parti Travailliste ?

Les accusations « d’antisémitisme » adressées par la droite du Parti Travailliste (Labour Party) contre les secteurs de gauche sont de pures calomnies ; cependant elles ont conduit à l’exclusion de plusieurs dirigeants proches de la gauche de Jeremy Corbyn.

Une organisation affiliée au Parti Travailliste qui s’appelle le Jewish Labour Movement, JLM, participe – avec d’autres – à des campagnes contre un supposé antisémitisme dans le Parti Travailliste. Ces campagnes sont systématiquement dirigées contre les travaillistes qui appuient Corbyn. L’intention est bien de marginaliser les idées anti-impérialistes et de couper Corbyn de sa base d’appui. Des organisations comme le JLM pointent un doigt accusateur sur certains membres du Parti Travailliste mais en fait c’est son appareil qui les suspend et les exclut.

On ne peut pas faire l’amalgame entre antisémitisme et antisionisme. Cette confusion donne l’occasion de punitions arbitraires contre des camarades du Parti Travailliste qui critiquent la politique sioniste extrémiste de l’Etat d’Israël et en particulier celle du gouvernement fascisant de Netanyahou. L’antisémitisme que le JLM prétend dénoncer se limite à la défense de Sémites d’orientation juive, à l’exclusion des Sémites d’origine arabe et autres. C’est ainsi que cette organisation justifie avec acharnement la politique génocidaire et coloniale d’Israël.

L’activité du JLM dans les localités travaillistes se consacre à renforcer la structure pro-impérialiste du Parti Travailliste. Cette structure s’exprime dans le fait que la direction du parti soutient les guerres de l’impérialisme britannique et qu’elle impose ses décisions sans permettre à la base du parti de se prononcer. Le dirigeant anti-guerre Jeremy Corbyn a été élu à la direction du Parti Travailliste il y a 9 mois, mais il est à peine toléré à son poste. Là, il se bat chaque minute  contre une équipe parlementaire de quelque 220 députés travaillistes dont 171 lui ont enjoint en public d’abandonner son poste. Ce qu’il n’a pas fait, bien sûr. Presque tout son cabinet ministériel a démissionné, s’offrant en spectacle aux cameras de télévision, et la raison pour cela était qu’il n’avait « pas assez lutté contre le Brexit » durant la campagne du référendum. Ceci n’est même pas vrai puisqu’il a conseillé de voter pour rester en Europe et pour réformer celle-ci, offrant des idées comme la défense de l’environnement européen et la défense commune contre l’austérité. Corbyn reste à son poste, encouragé par son très grand appui populaire dans tout le pays.

Tous les syndicats se sont prononcés pour lui, et s’il y a une nouvelle élection pour le remplacer, les syndicats pèseront dans le vote pour un tiers. L’autre tiers sera composé des membres du parti et le reste sera pour les députés. Les pronostics bourgeois prévoient qu’il va obtenir encore plus de voix qu’il y a 9 mois ! Corbyn a un fort appui chez les jeunes. Et dans le parti, les organisations de base (branches) s’organisent contre les détracteurs du JLM et leurs alliés les Blairistes.

Durant les années de Tony Blair (de 1994 jusqu’à présent), les clauses socialistes de la constitution du Parti Travailliste furent effacées. Puis Miliband chercha à créer un parti semblable au Parti Républicain des USA, sans toutefois y parvenir. Au fil de ces années-là, les dirigeants travaillistes ont appuyé les guerres contre la Yougoslavie, l’Iraq, l’Afghanistan, la Somalie, le Yémen et bien d’autres. Ces dirigeants ont été récompensés pour services rendus à l’impérialisme britannique. Ceux qui ne sont pas restés dans les rouages gouvernementaux sont devenus lords (ennoblis), ou ont obtenu des postes diplomatiques, des placements lucratifs dans la spéculation bancaire, immobilière, financière, etc.

Les simples militants travaillistes montrent leur colère. Ils défendent l’ouvrier et les Palestiniens. L’antagonisme entre eux et la direction du parti paraît sans précédent. Ces nouveaux membres sont trop nombreux pour être directement réprimés par la force, comme le capitalisme voudrait bien le faire. Il y a à peine 9 mois que 250.000 membres du parti ont voté Corbyn ! La classe capitaliste en est restée soufflée, c’est elle qui incite à présent les réactions haineuses et violentes contre Corbyn, contre la députée Jo Cox qu’ils ont assassinée et contre les immigrés.

Le fils de Tony Benn, Hilary Benn – un des députés travaillistes de droite à la Chambre des Communes – conseille à l’armée britannique d’envoyer des soldats en Syrie, même s’il faut affronter la Russie. Quel miracle cet homme pour le capitalisme : un autre Blair !

La chasse aux « antisémites » dans le Parti Travailliste est déjà en échec

La campagne actuelle contre un soi-disant antisémitisme dans le Parti Travailliste punit – et sans explications – les camarades qui critiquent l’Etat d’Israël, ou appuient les Palestiniens et les campagnes BDS*. Si les punitions pouvaient réussir, il en résulterait une séparation dans le parti entre la masse des nouveaux adhérents, qui sont nombreux et généralement anti-impérialistes, et la direction Corbyn que cet éloignement contribuerait à isoler dans un recoin du parti. Corbyn parvient à déjouer ce jeux en participant à toutes les grandes grèves et mobilisations, et même les petites.

Il faut donc aider à créer des courants anti-impérialistes sérieux dans le parti, qui parviennent à rejoindre politiquement et organiquement la direction Corbyn, au travers du parti et pas seulement lors des grandes mobilisations et luttes. Dans ce processus difficile et de répression interne, c’est la classe ouvrière qui attire et qui donne confiance à la population de se rapprocher du parti. Au-delà de la personne de Corbyn, la classe ouvrière voit la possibilité de créer des courants dans le parti et de se servir de la direction Corbyn pour le transformer. Ceci est en train de se produire. Ce n’est pas l’appui aux Palestiniens qui trouble les dirigeants travaillistes mais la détermination des masses à lutter contre l’austérité et contre le capitalisme.

La débandade qui a suivi la victoire du Brexit au Royaume-Uni a renversé la direction Cameron. Il devient à présent envisageable de renverser le Parti Conservateur aussi. De nouvelles élections générales se profilent. Une réunion impromptue le 26 juin 2016 dans la rue, au « Parliament Square », a rassemblé la classe ouvrière, les syndicats, leurs nombreux alliés dans la population et la direction Corbyn. Cette dernière se trouvait entourée de ses quelques parlementaires fidèles, au bord des larmes, prêts à ne pas laisser « tomber » Corbyn de son poste.

La base ouvrière et travailliste sent la possibilité de constituer un gouvernement Corbyn. C’est pour cette raison que la droite Blairiste du parti se dresse, comme un serpent mordu, appuyée à fond par la presse bourgeoise. Le Parti Conservateur n’a aucune idée de ce qui lui arrive. La bourgeoisie se rend bien compte qu’elle ne peut pas envoyer la police pour casser les rassemblements Corbyn.

La masse travailliste voit pour la première fois depuis longtemps qu’elle peut s’organiser dans le Parti lui-même, contre les attaques de l’austérité et de l’exploitation sauvages. Dans sa volonté d’argumenter la différence entre l’antisionisme et l’antisémitisme, la gauche du parti voit la nécessité de se constituer en groupes d’étude et de défense. Ceux-ci rassemblent intellectuels, ouvriers, étudiants, féministes, environnementalistes, syndicalistes et membres du parti, avec des moyens de communication sans précédents. A ceux-ci, Corbyn donne une certaine vision européenne, internationaliste et mondiale.

Cette gauche se rassemble autour des organisations déjà en place pour la paix, contre l’austérité, contre les évictions, contre l’incurie officielle à tous les niveaux, etc. Elle dénonce l’imbécillité de l’austérité et des guerres. Elle appuie les Palestiniens et met réellement en grande difficulté l’alignement impérialiste des dirigeants du Parti Travailliste.

Posadiststoday.com le 29.6.16

* Boycott Désinvestissement et Sanctions.